Samuel Billong : « Le Président engage manifestement la campagne pour sa réélection en 2025, ignorante à la fois le débat sur le risque que son huitième mandat à 92 ans fait courir au pays »

Réaction du Président du Mouvement Réformateur au Message du Chef de l’Etat à la Nation du 31 décembre 2024.

« Depuis quelques années, les messages de fin d’année à la Nation du Président Biya, Chef de l’Etat se ressemblent par une absence de profondeur et se réduisent à une compilation de satisfécits de ses ministres, poussant la propagande gouvernementale jusqu’à une véritable prestidigitation. On comprend aisément en écoutant ou en lisant son discours du 31 décembre à la fois l’absence de cap de l’action gouvernementale, le défaut de coordination et l’absence de recul dans l’appréciation des actions des membres du Gouvernement. On comprend aussi que le Président Biya qui n’a plus l’énergie de ses 50, 60 et 70 ans, lui qui, pour résoudre par exemple le défi des villes mortes du début des années 90 a parcouru toutes les régions du pays, est quasiment en incapacité de diriger le pays aujourd’hui. Le plus grave étant que ceux qui le maintiennent au pouvoir au lieu de le laisser prendre une retraite bien méritée sont encore plus dans l’incapacité à l’accompagner. Ils se neutralisent dans des luttes de clans avec pour seul objectif jouir le plus longtemps possible des privilèges du pouvoir. Tout ceci abouti à un discours totalement hors-sol.

La population de Yaoundé est estimée à plus 4 600 000 habitants soit près de 900 000 ménages. Comment le Président peut-il se satisfaire d’une campagne de branchement de 8 000 ménages pour la distribution de l’eau potable à Yaoundé où à peine 20% seulement des besoins quotidiens en eau potable sont couverts?  Le Président Biya sait-il qu’une large majorité des habitants de notre pays n’ont pas accès à une eau propre à la consommation alors que les besoins en eau potable du pays ne représentent même pas 5% de nos ressources en eau ? De la même manière, Le Président Biya pense pouvoir améliorer les performances du secteur de la santé avec un recrutement 9 944 personnels sur une période de 5 ans, soit moins de 2 000 agents par an alors que les besoins en personnel de santé se situent aujourd’hui autour de 75 000 personnels avec 20 000 agents temporaires en activité dans le secteur. Nous avons là, l’illustration des mesures inefficaces sans prise sur la réalité et en déphasage avec l’évolution démographique du pays. D’ailleurs, «la forte poussée démographique » dans le discours du président est un élément négatif qui sape les prétendues efforts du gouvernement alors que logiquement la démographie est avant tout un paramètre d’ajustement des politiques de développement.

Le Gouvernement fait dire au Président Biya que le prix du ciment a baissé avec l’installation d’une sixième cimenterie alors que l’harmonisation des prix par le Gouvernement est défavorable au pouvoir d’achat des Camerounais ; le sac 50 kg de ciment 42.5R est aujourd’hui homologué à 4 900 FCFA à Douala et 5 200 FCFA à Yaoundé alors que l’année dernière il pouvait être acheté à 4 700 FCFA et 5 000 FCFA respectivement dans les mêmes villes. De la même manière, le Gouvernement fait dire au Président Biya que l’augmentation du prix d’achat du cacao aux producteurs est une conséquence de sa soi-disante «politique de promotion de l’excellence qualitative» alors que c’est la conjoncture internationale avec la réduction de l’offre en Côte d’Ivoire et au Ghana  qui est à l’origine de cette augmentation. Dans ces deux exemples, une propagande gouvernementale trompeuse aboutit aux éléments mensongers du discours présidentiel, chose qui est fort regrettable.

Un cinquième du message présidentiel est dédié à la situation sécuritaire du pays et, à défaut d’éclaircissement sur la nouvelle ligne gouvernementale eu égard à l’échec du tout répressif pour résoudre la crise dans les régions anglophones du pays, le Président est dans le déni de la réalité en refusant de manière totalement incompréhensible d’évoquer le sort du Sous-préfet d’Idabato kidnappé et entre les mains de ses ravisseurs depuis octobre dernier ou dans l’incantation en appelant une fois de plus les bandes armées à déposer les armes alors que son propre gouvernement a fermé la porte à toute résolution pacifique de la crise dans ces régions. Le Président a totalement ignoré les agressions que subissent au quotidien les camerounais dans les transports urbains, la multiplication des assassinats dans nos villes et campagnes, les violences faites aux femmes avec la multiplication des actes de feminicides… il s’est coupé ou est coupé des camerounais il y a fort longtemps ; pas un mot de compassion pour les nombreuses victimes de l’insécurité au Cameroun, un autre déni.

Les camerounais qui vivent au quotidien les effets de la corruption et des détournements des deniers publics ne peuvent qu’être profondément déçus du peu d’importance que le Président a accordé à l’amélioration de la gouvernance dans son message. Trois lignes seulement et surtout, rien de concret pour arriver à dire que « Soyez assurés d’une chose. Des sanctions appropriées seront infligées aux auteurs des infractions qui seront établies ». Cette partie de son discours en soi est une vraie plaisanterie. Si les infractions ne sont pas encore établies sur le projet d’automatisation de 14 postes de péage routier en partenariat public-privé, au nom de quoi ce projet a été arrêté ? Plus de trois ans après la révélation de malversations d’un montant de 180 milliards de francs CFA par la cours des comptes quand est-ce que les infractions y relatives seront établies ? Le président ne soutient pas seulement la corruption et les détournements des fonds publics en refusant par exemple la mise en place du dispositif relatif à l’article 66 de la constitution sur la déclaration des biens, il semble totalement impuissant vis-à-vis d’un gouvernement qu’il est manifestement dans l’incapacité de remanier en maintenant des ministres pendant plus de 20 ans dans un même département ministériel. Il ne faut pas se leurrer, il n’y aura pas de bonne gouvernance sous le régime du RDPC.

Sur les perspectives, le Président engage manifestement la campagne pour sa réélection en 2025 ignorant à la fois le débat sur le risque que son huitième mandat à 92 ans fait courir au pays, ignorant aussi le débat sur la nécessité de  modifier le code électoral avant la prochaine élection présidentielle pour garantir l’inclusion, la transparence et l’équité de ce scrutin crucial qui pourrait faire basculer le pays dans le désordre. Et lorsqu’il aborde le problème réel pour les camerounais de la difficulté d’avoir accès à la carte nationale d’identité, c’est pour se défausser sur les camerounais qui seraient en situation de double identité. Le président ignore sans doute que des centaines de milliers de CNI sont sans preneurs dans les postes d’identification du pays pendant des camerounais sans double identité attendent leurs CNI depuis plusieurs années et que le problème marginal de la double identité évoqué par les services d’identification vise tout simplement à masquer les disfonctionnements dans le circuit d’établissement des CNI.             

Ces quelques observations sans être exhaustives apportent la lumière sur le grand décalage entre les politiques gouvernementales du RDPC et les préoccupations de nos concitoyens. Au regard des enjeux colossaux auxquels notre pays fait face à l’aube de la nouvel année et de la situation particulièrement difficile de nos concitoyens, je renouvelle mon message d’espoir au camerounaises et aux camerounais pour 2025 particulièrement en les appelant à prendre conscience de la situation difficile du pays et à se mobiliser collectivement pour remettre notre pays en marche. Le message du président n’augure pas des lendemains meilleurs mais c’est ensemble que nous allons faire renaître l’espoir au Cameroun.

Bonne et heureuse année 2025 !

                                                                                                                                                                                                              Samuel BILLONG                                                                                                

  Le Président National. »

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